01/09/2018

Manon, 21 ans, artiste peintre : elle a tout en plus !

Manon Vichy, 21 ans, a plus de 130 toiles à son actif. Cette jeune artiste, porteuse de trisomie 21, déjà reconnue dans le milieu, s'envole dans quelques jours pour le Canada. Elle expose ses œuvres dans le cadre de la manifestation « Regards croisés sur le handicap en contexte francophone », qui investit, du 12 au 15 juin 2018, la galerie de l'Université de Sainte-Boniface à Winnipeg.

Un talent découvert par hasard

Manon, comme de nombreux enfants handicapés, a rencontré des difficultés pour s'intégrer dans un milieu « ordinaire ». Elle suit une scolarité à temps partiel, en maternelle puis en primaire. Petite, on lui explique qu'elle possède « quelque chose de supplémentaire, sur la 21e paire de chromosomes. »« Du coup, je démarrais dans la vie avec du bonus », ironise-t-elle. « J'ai su reconnaître les couleurs avant les mots ». En 2011, elle s'inscrit dans un atelier d'art thérapie. Un jour, ses parents, après avoir reçu une toile de son art-thérapeute, remercient cette dernière pour le cadeau. Surprise : c'est bien Manon qui a l'a peinte. C'est une révélation ; leur fille possède un véritable don pour la peinture.

Une manière de s'exprimer

À 16 ans, elle fait sa toute première exposition sur le marché de Noël de Saint-Genès-Champanelle (63), et son univers particulièrement coloré reçoit des critiques très positives. « J'ai appris à exprimer mes émotions grâce à la peinture et à la musique », explique celle qui s'adonne également au chant et au piano. Parce qu'elle a des difficultés à parler, elle livre ses pensées sur ses toiles. Une autre façon de partager sa sensibilité.

D'autres peintres…

Manon Vichy n'est pas la seule à faire parler son talent via la peinture. Maryam Alakbarli, une jeune femme de 26 ans originaire d'Azerbaïdjan, expose dans le monde entier (Dubaï, Moscou, Rome…). En avril 2017, elle était à Paris (article en lien ci-dessous). À l'instar de Manon qui souhaite, à travers son art, aller à la « rencontre » et « partager avec les gens », Maryam offre ses toiles à ceux qu'elle aime. De son côté, Judith Scott, trisomique et sourde, s'est fait connaître grâce à ses sculptures textiles. Des parcours inspirants pour convaincre que l'art ne connait ni frontières ni préjugés. En attendant, comme l'espère Manon, de vivre un jour de ses toiles…

"Tous droits de reproduction et de représentation réservés.© Handicap.fr. Cet article a été rédigé par Mohamed Rharbal , journaliste Handicap.fr"

 

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Aides techniques

Une aide technique est un dispositif, équipement, instrument, logiciel disponible sur le marché ou fabriqué spécialement pour les personnes en situation de handicap pour

  • protégrer, soutenir, entraîner, mesurer ou remplacer les fonctions organiques
  • prévenir les déficiences, le combler en partie ou entièrement

Afin de favoriser une meilleure adaptation et une meilleure participation aux activités de la vie quotidienne.

Qui peut vous conseiller ?

Le mieux placé est l'ergothérapeute qui connait les pathologies, les thérapies, les retentissements sur la vie quotidienne et la qualité de vie. Il met en corrélation l'aide technique et l'aménagement du domicile avec les besoins de la personne.

Aides à la marche  
Le kinésithérapeute est habilité à prescrire ces aides techniques. En tant que rééducateur de la marche, il peut conseiller pour le choix et l'usage.

Aides au niveau des pieds 
Des chaussures orthopédiques peuvent être prescrites par votre médecin. Un podologue, podo-orthésiste peut vous conseiller un chaussage particulier disponible en série ou fait sur mesure si c'est nécessaire. 

Aides au niveau des fonctions locomotrices 
Les orthèses (attelle, gouttière, corset…) seront prescrites par votre médecin. Elles sont en général disponibles en pharmacie ou commandées (1 ou 2 marques seulement). Pour des orthèses sur mesure, il faut faire appel à un orthoprothésiste. 

Aides optiques et auditives
Les médecins spécialistes des yeux : opthalmologue  orthoptiste et des oreilles prescriront des données précises pour que vous trouviez des aides qui correspondent à votre handicap. 
Les opticiens vous renseigneront sur les aides techniques qui peuvent optimiser votre vue ou la compenser et vous les fournissent.
Les professionnelles de l'audition conseillent et fournissent les appareillages qui conviennent avec les accompagnements nécessaires (boucles magnétiques par exemple).

Où trouver et essayer des aides techniques?

Avec les conseils d'un ergothérapeute

Les centres d'informations et de conseils sur les aides techniques : CICAT
Ils informent et conseillent sur les différentes aides techniques pour les personnes handicapées (fauteuil, canne, domotique,…). Vous pouvez prendre rendez-vous avec un ergothérapeute et/ou une documentaliste, essayer des aides techniques, visite un appartement témoin,…
Nb : de nombreux CICAT ayant fermé leurs portes, faute de financement, des associations ont pris le relais (exemple l'association le Centre).

Les maisons départementales de l'autonomie : MDA
Ce sont certaines organisations répondant aux prescriptions d'un cahier des charges (différents critères qui expérimentent le rapprochement entre l'information, l'accueil, l'évaluation des personnes âgées ou handicapées). 
Ces maisons sont soutenues par la Caisse Nationale de Solidarité ( CNSA).

Sans les conseils d'un ergothérapeute

Certaines associations ont constitué une base d'aides techniques et les mettent à disposition soit localement, soit dans toute la France.
Exemples : APF France Handicap, ARSLA: Association pour la recherche sur la Sclérose Latérale Amyotrophique, Association du locked-in syndrome

Il existe aussi des associations qui prêtent du matériel.
Exemple : APAMP, Association pour le Prêt d'Appareillage aux Malades Paralysés. 

Les salons Autonomic, Handica, Handimetic
Les salons Autonomic se déroulent dans les palais d'expositions de 8 grandes villes : Paris, Nancy, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Rennes, Lille. A Lyon, c'est le salon Handica et à Poitiers, le salon Handimetic. 
Chaque ville accueille ce salon tous les 2 ans soit 4 par an. On trouve de nombreux exposants : déambulateur, fauteuil roulant jusqu'à l'aménagement du lieu de vie et de la voiture. 

Les salons Seniors ou services à la personne
Ces salons peuvent accueillir des stands avec des aides techniques même si le coeur de ces salons reste les services.
Les salons seniors sont organisés dans beaucoup de régions. Ils sont en lien avec les préoccupations des personnes retraitées : santé, mutuelle, sports et loisirs, services à la personne, audition, vision, technologies adaptées, maisons de retraite, etc.
Quant au salon du service à la personne et de l'emploi à domicile, il est organisé tous les ans à Paris, porte de Versailles et regroupe l'ensemble des organismes de France.

Dans les boutiques de vente et location de matériel médical
Toutes ne proposent pas d'essayer les aides techniques et celles qui le font n'ont pas toutes les aides à disposition, pensez à appeler les boutiques pour ne pas vous déplacer pour rien.
Cas particulier : Vitaconfort à Paris dispose de nombreuse aide technique et prête le matériel pour des essais à domicile.

Chez les vendeurs de matériel technologique
C'est le cas pour le matériel de compensation de déficit de la vue.  Ceciaa, ou certains opticiens qui distribuent des aides techniques prêtent certains produits.
A défaut de prêt, des séances d'essais sont organisées avec les vendeurs de matériel technique et onéreux.

Où se procurer une aide technique?

En boutique 

Dans les boutiques classiques de vente et location de matériel médical.
Auprès des commerciaux itinérants pour les produits qui nécessitent une installation à domicile, ou très techniques et spécifiques.
Dans les boutiques en lignes pour les aides techniques que vous avez déjà essayées ou pour lesquelles l'essai n'est pas indispensable. 

En réseau éco solidaire : les aides techniques d'occasion 

Envie Autonomie 
Les aides techniques sont recueillies à Rennes, Trelaze-Angers, Saint Etienne, Nancy, Strasbourg et bientôt Nantes, La Roche sur Yon, Reims et Montbéliard et toute la région alentour bien sûr. 
Elles sont ensuite mises à neuf par des employés en insertion et revendues à petit prix. 

La Recyclothèque à Bordeaux (Mérignac) au sein du GIHP qui héberge également le CICAT. 

La Technicothèque à Angers où les personnes à faibles ressources peuvent se procurer gracieusement (contrairement aux autres) les aides techniques préconisées en amont par la MDA. 

EcoReso : les produits  coûtent 30 à 50 % de moins que neufs à l'achat et à la location. Les clients peuvent bénéficier de la visite d'un ergothérapeute à domicile pour une bonne préconisation. Ouverture dans le Val de Marne en novembre 2017. 

Dans des associations qui recueillent et remettent en état les aides techniques et les donnent comme Handimat à Lyon.

Comment financer une aide technique?

La LPP : liste des produits et prestations remboursables par l'Assurance Maladie

Certaines inscrites au LPP, sont en partie remboursées par la sécurité sociale et la mutuelle sur prescription médicale.
Cette liste comprend : dispositifs médicaux pour traitements et matériels d'aide à la vie, aliments diététiques et articles pour pansements, orthèses et prothèses externes, dispositifs médicaux implantables et des véhicules pour handicapés physiques.
Pour plus de renseignements et connaître cette liste,  consultez notre fiche financement LPP.

La PCH : Prestation de compensation du handicap : consultez notre fiche financement PCH 

L'APA : l'aide personnalisée pour l'Autonomie : consultez notre fiche financement APA.

Comment les aides techniques sont-elles classées ?

Les aides techniques sont classées par grandes familles, avec un code à 2 chiffres 

04 : Produits d'assistance au traitement médical individuel 
05 : Produits d'assistance à l'éducation et à la (ré)éducation des capacités 
06 : Produits d'assistance attachés au corps pour soutenir les fonctions de l'appareil locomoteur et liées au mouvement (orthèses) et remplacer les structures anatomiques (prothèses) 
09 : Produits d'assistance aux activités d'entretien personnel et à la participation à l'entretien personnel 
12 : Produits d'assistance aux activités et à la participation en rapport avec la mobilité personnelle et le transport
15 : Produits d'assistance aux activités domestiques et à la participation à vie domestique 
18 : Aménagements, accessoires et autres produits d'assistance aux activités de soutien dans les environnements intérieurs et extérieurs créés par l'homme 
22 : Produits d'assistance à la gestion de la communication et à l'information 
24 : Produits d'assistance pour contrôler, porter, déplacer et manipuler des objets et des dispositifs 
27 : Produits d'assistance pour contrôler, adapter ou mesurer les éléments des environnements physiques 
28 : Produits d'assistance aux activités professionnelles et à la participation à l'emploi 
30 : Produits d'assistance à la récréation et aux loisirs 

Elles se déclinent à l'intérieur d'une famille en sous familles à 4 chiffres

Prenons l'exemple de la famille 12 : produits d'assistance aux activités et à la participation en rapport avec la mobilité personnelle et le transport. Les sous familles à 4 chiffres sont les suivantes

12.00 : Produits d'assistance aux activités et à la participation en rapport avec la mobilité personnelle et le transport 
12.03 : Produits d'assistance à la marche manipulés par un bras 
12.06 : Produits d'assistance à la marche manipulés par les deux bras
12.07 : Accessoires pour produits d'assistance à la marche 
12.12 : Accessoires et adaptations de véhicules 
12.16 : Cyclomoteurs et motocycles 
12.17 : Autres véhicules motorisés
12.18 : Cycles 
12.22 : Fauteuils roulants manuels 
12.23 : Fauteuils roulants motorisés 
12.24 : Accessoires de fauteuils roulants 
12.27 : Autres véhicules à propulsion humaine
12.31 : Produits d'assistance permettant de changer la position du corps 
12.36 : Produits d'assistance permettant de lever des personnes 
12.39 : Produits d'assistance permettant de s'orienter 

A l'intérieur de ces sous familles, une dernière déclinaison permet d'attribuer un code iso à 6 chiffres à un type de produit. Ce code est l'ISO 9999 qui utilise la terminologie de la classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF).Prenons l'exemple des "produits d'assistance à la marche manipulés par les deux bras" 12.06 

12.06.03 : Cadres de marche 
12.06.06 : Déambulateurs 
12.06.09 : Chaises de marche
12.06.12 : Tables de marche


Cette fiche d'information sera mise à jour régulièrement selon l'actualité des aides techniques et ne se veut pas exhaustive.

 

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Sur le web

Sexualité : que désirent les personnes handicapées ?

Une maman pour son fils de 29 ans : « Il vit en institution spécialisée. Nous pouvons recevoir à notre domicile familial, il est très dépendant d'une tierce personne. Qu'il apprenne à se masturber.» Un homme de 44 ans : « Je cherche plaisir sensuel et sexuel pour apprendre à découvrir mon corps. ». Une femme de 23 ans : « Des caresses et des baisers, de la tendresse, de la douceur. Ou de la sexualité. » A quoi ressemble la sexualité des personnes handicapées, quelles sont leurs attentes ?

3 formations inédites en France

Pour le savoir, l'Appas (Association pour la promotion de l'accompagnement sexuel) publie, le 17 mars 2016, la première étude sur la situation de l'accompagnement sexuel des personnes en situation de handicap en France, conduite par Akim Boudaoud, psychologue-sexologue et vice-président de l'association (édito en lien ci-dessous). Au même moment, a lieu la troisième formation à l'accompagnement sexuel organisée par l'Appas, à Erstein (Bas-Rhin). La première édition fut initiée près de Strasbourg en mars 2015, suscitant un vaste engouement médiatique et un débat sociétal (article en lien ci-dessous) ; c'est à la suite de cette cession que l'association a ouvert sur son site une rubrique permettant à ceux qui le souhaitent de solliciter un accompagnement. Cette étude vise donc à synthétiser la diversité des demandes formulées par les personnes en situation de handicap et leurs proches.

155 demandes analysées

Sur 180 demandes reçues, 155 ont pu être analysées. Selon l'Appas, cette étude  a « su traduire en mots et en « maux » la réalité d'êtres humains dépossédés de ce qui lui permet « d'être » comme tout le monde ». Comme une première photographie de la population française concernée par cette question, qui, selon ses promoteurs, vise à « démystifier la question de l'accompagnement sexuel et de voir un peu plus clair sur un sujet polémique ». Elle s'inscrit dans le cadre de l'observatoire de la santé sexuelle que l'Appas est en train de créer. Selon Marcel Nuss, son président, « cette première étude traduit la réalité de l'intimité et de la vie affective et sexuelle des personnes en situation de dépendance. Elle va nous permettre de mieux les comprendre et de mieux les accompagner. »

Seulement 5% de femmes

Les personnes qui se sont manifestées sont âgées de 18 à… 94 ans ! Ce sont surtout des hommes (la population féminine ne représente que 5% des sollicitations), principalement de 26 à 35 ans (29% des demandes) et de 36 à 45 ans (23%). Tous handicaps confondus. Le handicap moteur est cependant la principale limitation observée devant les handicaps psychiques, manifestés par un dysfonctionnement de l'expression des émotions, de l'affection et de la communication. Les personnes concernées par les demandes d'accompagnement ne partagent pas le même mode de vie ; la majorité déclare vivre seule, juste devant la catégorie des personnes vivant en famille (père, mère, deux parents, sœur ou fils). La frange des personnes vivant en couple ou en institution se révèle ainsi minoritaire. La plupart des demandes ont été formulées par la personne concernée. Cependant, certaines ont eu besoin d'un tiers pour écrire leur besoin ; il s'agit alors de proches (familles) ou auxiliaires de vie (exerçant en milieu institutionnel ou privé). La première demande concerne l'acte sexuel ; elle s'exprime plus particulièrement chez les 36-45 ans et les 26-35 ans. Viennent ensuite les câlins et le toucher, puis l'affection, la tendresse et la confiance en soi.

Depuis plus de trente ans, en Europe, les personnes handicapées sont en mesure de bénéficier de services d'accompagnants sexuels professionnels. Marcel Nuss, lui-même en situation de dépendance vitale, interpelle la société sur cette question qui continue à faire débat depuis des années en France.

Pour se procurer l'intégralité de cette enquête, contact par mail :communicationappas@gmail.com

© Antonioguillem/Fotolia

Vie intime dans les institutions : l'amour interdit ?

Nouveau sur handicap.fr en 2017. Chaque mois, votre media en ligne vous propose un vaste dossier thématique. En février, mois de la Saint Valentin, c'est l'amour et la vie affective et sexuelle qui sont à l'honneur.

« Tous aspirent à la rencontre et au partage ». C'est l'une des premières remarques de Jennifer Fournier lorsqu'il lui est demandé ce à quoi ses travaux de recherche ont abouti. Silhouette fine, grand sourire et cheveux châtains, cette docteur en sciences de l'éducation à l'université Lumière Lyon 2 a conduit, durant six ans, une thèse sur la vie amoureuse et intime de personnes en situation de handicap moteur au sein d'établissements médico-sociaux en Rhône-Alpes.

Comprendre « l'écart »

Intitulé « La vie intime, amoureuse et sexuelle à l'épreuve de l'expérience des personnes en situation de handicap : l'appréhender et l'accompagner », ce projet de recherche de longue haleine l'a conduite à exercer le métier d'animatrice de groupes de parole sur la vie intime. Dirigée par l'anthropologue Charles Gardou, spécialiste des questions de handicap, sa thèse est disponible sur le site de l'université Lyon 2 (en lien ci-dessous). Pourquoi avoir choisi ce sujet ? « Je voulais comprendre, entre autres, un certain écart perçu entre les professionnels de ces établissements et les personnes dont ils s'occupent », explique la chercheuse.

Plusieurs prises de parole

Pour ce faire, trois recueils de données ont été réalisés : un questionnaire de 12 questions adressé aux personnes pour évaluer leur contexte de vie en établissement et « savoir dans quels espaces on parle de la vie amoureuse » ; la participation à des groupes d'analyses et de pratiques de professionnels, qui échangent sur le cadre relationnel et le lien entretenu avec les personnes, puis des séries de questions posées à 40 groupes de paroles issus de différents établissements, dont des foyers d'accueil de jour. « J'ai été formée pendant quelques jours pour animer ces groupes, confie la jeune femme. Mais j'ai mis un an à intégrer les groupes de professionnels, qui sont beaucoup plus fermés. »

Manque d'intimité

Que dévoilent ces recherches ? Dans l'ensemble, les attentes des hommes et des femmes sont les mêmes : faire des rencontres, sentimentales et/ou érotiques, entretenir une relation, voire fonder une famille. Mais le manque de confidentialité – il est interdit de fermer sa chambre ou son studio à clé –justifié pour des raisons de sécurité, empêche l'accès à une intimité sereine. « Pendant longtemps, la vie amoureuse était interdite dans ces établissements, explique Jennifer Fournier. Cette idée d'interdit continue d'être véhiculée par les personnes. ». La jeune femme remarque par ailleurs que ces contraintes sont bien souvent tempérées par la crainte de la solitude, qui reste, selon les résidents, la pire des situations.

« Tu ne laves pas le capot de ta voiture ! »

Tisser un lien de complicité avec les professionnels qui les prennent en charge fait également partie des aspirations de la plupart des personnes prises en charge dans ces établissements, selon Jennifer. « En revanche, les référents perçoivent ce besoin de complicité de façon péjorative et tentent de l'éviter en adoptant des attitudes souvent vécues, en face, comme des humiliations », constate-t-elle. Cette recherche de sollicitude, mal reçue, fait par exemple s'opposer gestes techniques et tendresse, d'où des remarques parfois très incisives : « Attention, t'es pas en train de laver le capot de ta voiture ! », entre autres phrases prononcées à l'encontre d'un professionnel. Autre constat déconcertant : « Lorsque les professionnels évoquent, entre eux, la vie amoureuse des personnes dont ils s'occupent, ils ne parlent jamais des relations entre des « couples de personnes handicapées » mais plutôt de sentiments à leur égard, qui sont à sens unique. Une forme d'amour lui aussi handicapé », remarque la chercheuse. À sa connaissance, aucun dispositif de médiation entre personnes et professionnels n'existe aujourd'hui dans les établissements où elle s'est rendue.

Perçus comme des êtres de besoin

Ses conclusions arrivent toutes à une même vision, dite « essentialiste », selon laquelle les personnes en situation de handicap sont uniquement perçues via le prisme de leur déficience. Elles invitent aujourd'hui Jennifer à se poser d'autres questions : pourquoi n'y a-t-il pas révolte au sein de ces groupes ? Pourquoi le modèle psycho-social (par opposition au modèle médical), n'est-il pas davantage promu au sein des établissements ? Ce modèle, qui stipule que la situation de handicap est créée par l'environnement, c'est-à-dire par la société et son organisation, est pourtant promu par CIF (Classification internationale du fonctionnement), établie par l'OMS (Organisation mondiale de la santé) et entérinée par l'Assemblée mondiale de la santé en 2001.

Un colloque en juin 2017

Ces questions seront évoquées lors du colloque « Désir et aimer, quelle liberté ? Construction des savoirs et transmissions », le 14 juin 2017 à l'université Lyon 2, en présence de Charles Gardou. L'occasion de croiser différents regards autour de la vie affective et sociale des personnes en situation de handicap.

© Fotolia + DR Fournier

 

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Handicap : des consultations "sexualité" remboursées

La sexualité et l'intimité, un droit fondamental pour tous ? Oui, répond Bond Moyson, une mutuelle de Flandre orientale (Belgique) qui, depuis le 1er janvier 2018, inscrit dans ses offres le remboursement d'une nouvelle prestation dédiée aux personnes âgées et handicapées.

Une association militante

Les membres qui font appel aux services d'Aditi se verront en partie rembourser leur consultation (40 euros sur 90). Cette association, membre de l'European platform sexual assistance, fournit des conseils, des informations et un soutien sur les soins de sexualité et d'intimité adaptés aux personnes handicapées et âgées. Concrètement, la séance consiste en une conversation avec un psychologue ou un sexologue afin de proposer des solutions pratiques ; le cas échéant, ce peuvent-être des massages tantriques ou la visite à domicile d'un « fournisseur de service sexuel » qui propose une relation intime contre paiement (cette prestation n'est pas remboursée). Interdit en France car assimilé à de la prostitution (article en lien ci-dessous), l'accompagnement sexuel destiné aux personnes handicapées est autorisé en Belgique.

Soins alternatifs ?

Cette décision de Bond Moyson intervient dans un contexte où de plus en plus de mutuelles consentent à diversifier leur prise en charge et encouragent les alternatives à la médecine dite traditionnelle, comme l'ostéopathie, l'acupuncture, l'hypnose. Et même la pratique sportive adaptée aux personnes atteintes de maladies chroniques (en ALD), ce qui est le cas, notamment, en France, de la Maif (article en lien ci-dessous). Mais le déploiement de cette offre dédiée à la sexualité s'avère pour le moins inédit ; elle est pourtant conforme aux orientations de l'OMS (Organisation mondiale de la santé) qui défend le principe de « santé sexuelle ». En Belgique, du côté francophone, aucune mutuelle n'offre ce type de remboursement.

En France, seules les consultations chez un médecin sexologue, titulaire du DIU, sont remboursées par la Sécurité sociale, à hauteur de 70%, avec un complément de la mutuelle, à condition qu'elles soient motivées par un besoin médical et non de confort. Les personnes handicapées y trouveront-elles des conseils aussi avisés ?

© tiagozr/Fotolia

 

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